En relisant mes derniers billets, j’ai constaté avoir abordé une notion que je n’avais pas encore approfondie sur ce blog et qui me semble pourtant être la base de toute relation de qualité dans les rapports humains et la communication. Je veux parler de l’accueil inconditionnel. Pour ne rien vous cacher, je me suis aperçu que j’avais encore un bon stock de sujets que je n’avais pas encore traités. Et moi qui me plaignait d’être en manque d’inspiration ces derniers temps… 😉
L’accueil inconditionnel à l’époque de la guerre du feu
J’ai lu un jour un article qui expliquait comment un individu peut se faire une opinion d’une autre personne qu’elle rencontre pour la première fois, en seulement 15 petites secondes. Ce mécanisme est bien entendu archaïque et demeure dans notre inconscient depuis l’époque où nous vivions avec des peaux de bêtes en guise de vêtements et que la seule vue d’un étranger à notre clan suffisait à le considérer comme un potentiel ennemi (comment ça, certains en sont encore au même stade aujourd’hui ?!?)
Ce mécanisme instinctif n’est ni bon, ni mauvais en soi. Il nous a servi à une certaine époque à évaluer le danger auquel était confrontée notre tribu. Il a peut-être même sauvé les miches à quelques-uns de nos ancêtres.
Ce qui se passe lors de ces 15 secondes où notre interlocuteur est scanné se situe au niveau de notre ressenti et pourrait se traduire verbalement par quelque chose du genre:
“Ce type me parait OK (…ou pas)”
N’oublions pas non plus que si nous nous faisons une opinion instinctive de lui, il s’en fait une sur nous dans le même intervalle; nous descendons tous de la même famille poilue, chers lecteurs. Ce ressenti est donc quelque chose de naturel, d’instinctif, qu’il convient d’accepter pour ce qu’il est, mais qui fait désormais un peu “oldschool” en termes de relations humaines et d’accueil inconditionnel.
L’idée est alors d’aller voir ce que nous pouvons chercher au-delà de ce laps de temps de 15 secondes.
Prendre conscience de ce que nous ressentons au moment de la rencontre et l’accepter est une étape importante dans l’entrée en relation. Cette phase nous permet en effet de prendre un peu de recul sur nous-mêmes et favorise l’ouverture à l’autre. La deuxième phase, celle de l’accueil inconditionnel proprement dit, peut alors commencer.
Accueil inconditionnel : Phase 2
La base d’un accueil inconditionnel est le non-jugement, l’absence d’interprétation ou d’apriori. Pas facile, me direz-vous, surtout quand notre ressenti nous donne des informations contraires!!
J’entends souvent dire qu’il faut écouter son ressenti, que lui ne se trompe jamais, etc… Je suis en partie d’accord avec ça, et en même temps, je connais très peu de personnes qui soient suffisamment à l’écoute de ce qu’il se passe dans leur corps pour en tirer des informations utiles et valides. La plupart confond ce fameux ressenti avec ce qui est simplement de l’ordre de l’intuition cognitive (voir à ce propos un excellent article sur le sujet), influencée par le spectre de leurs croyances. Ce n’est alors ni plus ni moins que des interprétations (sous-entendu abusives).
A l’inverse, il ne s’agit pas non plus d’être dans le monde de Oui-Oui et d’être en béatitude lors d’une première rencontre avec un de nos semblables. Les têtes à claques sont parmi nous au même titre que les envahisseurs de David Vincent :-). Je vous recommande à ce sujet l’excellent article d’une consœur que j’ai déjà citée sur ce blog, Sylvaine Pascual, à propos d’un concept dont elle a la primeur: le bocal à con (j’ai adoré)
Je pense que le juste milieu de l’accueil inconditionnel se trouve dans cette posture d’ouverture bienveillante et de création d’un espace relationnel où l’autre peut commencer à livrer une partie de ce qu’il est. C’est là que l’accueil prend tout son sens. Écouter, s’intéresser, questionner (sans être dans l’interrogatoire policier), reformuler, acquiescer, sourire, regarder dans les yeux, voilà quelques actions qui favorisent l’accueil inconditionnel. Le tout saupoudré d’un ingrédient essentiel: la congruence (faire ce que l’on dit et dire ce que l’on fait)
Cette posture permet alors non seulement de rassurer le Cro-Magnon qui vit en chacun de nous, mais aussi d’en savoir un peu plus sur notre interlocuteur et ainsi considérer avec un peu plus d’objectivité si ses valeurs, ses motivations ou son fonctionnement sont en cohérence avec l’objectif de notre relation. Le niveau d’implication relationnel sera de fait ajusté à ce qui est bon pour lui, bon pour nous et bon pour le système que nous formons.
Pour finir
Je terminerai ce billet en soulignant que tout ce que j’ai développé ici fonctionne aussi vis à vis de nous-même. L’accueil inconditionnel de ce-qui-fait-de-nous-ce-que-nous-sommes est une étape nécessaire pour débuter le chemin de l’acceptation de soi.
Ainsi, le non-jugement, l’absence d’interprétation et d’apriori sur soi-même sont les mêmes éléments à cultiver au quotidien pour (s’a)cueillir en toute sérénité.
A la semaine prochaine
Merci Chris pour la mention du bocal à con!
J’en profite pour abonder dans ton sens: non, nos tripes ne se trompent pas, cependant effectivement, nous ne sommes pas suffisamment à l’écoute pour en recevoir autre chose que des messages tronqués ou biaisés par des craintes et des convictions parasites qui cherchent à se renforcer elles-mêmes. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle nous pouvons questionner nos ressentis, si diffus soient-ils, sur les gens que nous rencontrons: ce que ça nous dit sur nous-même (et non pas sur l’autre) et ce que ça nous renvoie;)