S’il existait un podium des principes toxiques pour les rapports humains ou à minima, un podium des principes limitant l’épanouissement personnel, je pense que les certitudes seraient placées sur la première marche. Toutes ces convictions, ces croyances que nous pouvons avoir sur Soi, les Autres, l’Avenir, le Passé ou le Monde, sont potentiellement autant de mini-prisons dans lesquelles nous nous enfermons souvent… et dont nous égarons parfois les clés pour en sortir.
Du coup, au bout d’un moment, on se sent un peu à l’étroit. Nos positions nous paraissent un tantinet inconfortables. Un peu comme quand on reste longtemps dans une mauvaise posture et que nos membres s’ankylosent. C’est douloureux et parfois cela nous énerve. Les comportements que nous adoptons alors sont de moins en moins adaptés au contexte et il suffit d’un rien pour nous faire basculer dans des réactions tout aussi inadaptées.
Et tout cela, chers lecteurs, est la conséquence de différentes pensées qui sonnent et résonnent en nous comme des vérités absolues, des dogmes immuables ancrés dans notre esprit comme une tique sur un chien.
J’avais déjà traité du sujet des croyances sous différents angles par le passé; dans un dossier spécifique sur les croyances pour commencer, en établissant ensuite un top 10 des croyances limitantes sur soi, puis un autre avec les croyances limitantes sur les autres et enfin en créant un lien entre croyances et changement. Cette fois-ci, je vous propose de regarder cette pierre angulaire du changement humain sous l’angle opposé : n’être sûr de rien ou comment (tant que possible) éviter de nous créer des croyances limitantes.
Confiance en soi et n’être sûr de rien
A première vue, il serait tentant de faire un lien direct entre le fait de n’être sûr de rien et le manque de confiance en soi. Je vous propose une seconde vue de la chose.
La confiance en soi et à fortiori son manque n’est pas forcément en lien avec le fait de n’être sûr de rien. Bien au contraire; n’être sûr de rien demande paradoxalement une solide confiance en soi.
Je m’explique.
N’être sûr de rien requiert une bonne dose de remise en question sur ses propres représentations de soi, des autres, du monde. Et se remettre en question, c’est savoir faire preuve de lâcher-prise sur ses propres certitudes.
C’est un peu comme si vous sautiez dans une rivière depuis un surplomb rocheux à plusieurs mètres de hauteur. L’appréhension est là et l’une de vos croyances fondamentales se manifeste en vous murmurant à l’oreille que sauter dans le vide, comme ça, n’est pas la meilleure idée que vous ayez eue en montant jusqu’ici. Aussi, si vous finissez quand même par faire un pas en avant et vous prendre pour Batman (ou Superman suivant votre sensibilité), c’est que la confiance que vous avez mis en vous, en la réception dans l’eau, en votre ami qui vous a confirmé qu’il y avait assez de fond, a pris le pas sur votre certitude du départ qui pourrait ressembler à : “sauter dans le vide, c’est pas bon pour ma santé”.
C’est ici que se joue la grande différence entre “n’être sûr de rien” synonyme de “je manque de confiance en moi et du coup je doute de tout, même de moi” et “n’être sûr de rien” synonyme de “je lâche prise sur des croyances qui me limitent dans ma vie et je laisse la place à la créativité et la curiosité pour expérimenter le monde qui m’entoure” (gros synonyme j’en conviens 🙂 )
Les avantages à n’être sûr de rien
Comme je le laissais entendre dans mon titre, je disais que je n’étais sûr de rien et que j’adorais ça. Pourquoi donc un tel enthousiasme ?
Voici au moins cinq (bonnes ?) raisons qui me font dire ça.
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Je suis dans un état d’apprentissage quasi permanent
En effet, le fait de laisser la place à l’incertitude me permet de partir à la découverte de choses toujours plus passionnantes. Et le truc fonctionne de façon exponentielle. En gros, plus j’apprends, plus cela m’ouvre de nouveaux horizons… donc de nouveaux questionnements… qui demandent à leur tour de nouveaux apprentissages… m’ouvrant de nouvelles perspectives, etc.
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La partie créative en moi tourne à plein régime
C’est presque mécanique; imaginez que vous soyez face à une problématique pour la première fois et que sa résolution ne dépende que de vous. Vous n’avez alors pas d’autre choix que celui de vous montrer créatif pour en venir à bout. Le fait de n’être sûr de rien préserve un regard neuf sur les situations que je rencontre. Pour m’aider dans cette démarche, je m’inspire des plus grands créatifs qui nous entourent : les bébés; pour qui le monde est un immense champ d’exploration où le moindre objet devient une énigme complexe à résoudre.
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Je donne une place privilégiée à la réflexion avant l’action
Bon, je vous l’accorde, là c’est un peu ma tendance à l’introversion qui me fait dire ça. Mais mise à part ce trait de ma personnalité que je revendique, le fait de n’être sûr de rien me permet de tourner ma langue un certain nombre de fois dans la bouche avant de l’ouvrir. Dans la même veine, cela me donne le recul suffisant pour analyser à minima une situation avant d’y intervenir. Je reconnais que ce n’est pas toujours possible suivant les situations, mais l’intention y est.
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Je joue à Nicolas le jardinier en cultivant mon champ relationnel
En étant curieux de découvrir les convictions des Autres, je leur permets d’exposer une partie de leur monde intérieur. En même temps ça tombe bien, ça fait partie de mon job… En n’étant sûr de rien, je suis d’autant plus à l’écoute des points de vue de chacun. Et être à l’écoute de l’Autre, en général, ça fonctionne plutôt pas mal, question qualité relationnelle. C’est un peu comme si je proposais à l’Autre un livre aux pages blanches sur lequel il peut écrire son histoire. Si j’avais déjà noircies les pages avec toutes mes certitudes, il n’y aurait plus beaucoup de place pour lui.
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Je m’exerce au stretching relationnel
Le fait d’être en questionnement vis-à-vis de mes propres croyances me donne la possibilité d’accéder au changement de manière un peu plus souple. Du coup, je me sens moins tendu quand un changement intervient dans l’un de mes domaines de vie. Et la décontraction, ça aide aussi à accepter les choses… dont le fait de n’être sûr de rien.
Bon, je pense avoir bouclé ma boucle…
Je vous laisse avec la très célèbre pensée de Socrate, le père spirituel du métier de coach :
Tout ce que je sais, c’est que je sais que je ne sais rien.
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Ah … ça fait du bien ! C’est aussi un peu mon histoire, et ce que j’aimerais faire passer comme message en tant que formatrice, maman, collègue…pas toujours facile…Ceci dit, il est tout à fait hors de question pour moi de sauter à l’eau, quelle que soit la qualité de la réception qui me sera promise !!! C’est déjà dur du bord de la piscine, alors….
« La seule certitude que j’ai, c’est d’être dans le doute » (Pierre DESPROGES)
Ce à quoi je rajoute « et même ça je n’en suis pas si sûr »
Merci à toi Christophe
Bonjour, Bonsoir Christophe !
Mon grain de sel sur « Je ne suis sûr de rien… et j’adore ça ! »
»les certitudes »
J’ai le sentiment que si nous ne pouvons que rarement avoir de certitudes sur ce qui se passe réellement devant, derrière et autour de nous, nous éprouvons par opposition un vrai ressenti des choses et des situations.
Je vous rejoins tout à fait sur le fait que ce soit très formateur et structurant au sens où ça nous permet de savoir réellement quelles sont nos valeurs, nos limites, nos sentiments, sensations dans tous les évènements de la vie.
En analysant nos réactions et en nous questionnant aujourd’hui agirions-nous pareillement ?
Certes, non ! ET la vie c’est qu’une fois, aussi ! un seul essai, pas de possibilité de rejouer la scène pour beaucoup de situations…et pas souhaitable, aussi ! 🙂
En fait, comme vous le dites si bien, nous sommes, pour ceux qui ont l’esprit ouvert, à la découverte de nous-mêmes.
De notre »vrai » personnalité, de ce qui nous constitue, nous valorise et fait que nous sommes une personne comme les autres, avec ses qualités et ses défauts.
Un être qui assume ses limites, n’entend pas les voir altérées, bafouées ou méprisées parce que pour arriver à ce résultat il a bien fallu en passer par là et »cravacher’.
Si, lorsque nous avons 20 ans (et les suivantes), nous sommes plein d’illusions, puissant et vaillant physiquement, convaincus d’être seul maître à bord, nous n’avons que peu de pouvoir décisionnaire souvent sur nos projets professionnels pour la plupart d’entre nous.
Nous subissons plutôt l’action puisque sans expérience et en apprentissage permanent pour acquérir savoir faire et savoir être.
L’épanouissement personnel vient avec une certaine expérience de la vie !
Nous sommes plus apte à juger de ce qui nous a réussi (ou pas) avec le temps qui est passé et le bilan positif ou négatif que nous en tirons.
Un dernier petit commentaire concernant les réactions inadaptées qui ne manquent pas d’intervenir soit au travail, soit dans nos vies personnelles : elles sont le fruit (le résultat) d’un agacement et/ou d’un manque de considération, de prise en compte et de réaction de la hiérarchie, de l’entourage. C’est mon avis.
Je vous souhaite de bonnes fêtes de fin d’année et vous dit à l’année prochaine.
Être heureux ! Tout un programme ! 😉
Dominique Martin
Merci pour cet article. Je me retrouve tout à fait dans l’état d’apprentissage permanent. Une curiosité en appelle une autre et plus je me documente, plus j’ai envie d’en savoir d’avantage. Les certitudes sont comme une seconde peau dont il est bien difficile de se défaire. On a peur de les laisser tomber et de se retrouver tout nu. Il faut se laisser du temps pour s’en débarrasser.
Oui, merci, puisque:
Vivre, c’est douter. La profondeur du doute est la mesure de notre humanité.
Aphorisme no. 48: https://phildurasoire.wordpress.com/nouveaux-aphorismes-inactuels/