Une petite vidéo cette semaine. Elle concerne une intervention que le philosophe André Comte-Sponville a tenu dans une école de management. Le titre de cette présentation est « Sens du travail, Bonheur et Motivation« . Un vaste programme que le philosophe a déroulé de façon claire et intéressante de mon point de vue. Bien entendue, le fil rouge de cette présentation est directement lié au thème de ce blog : les Rapports Humains. Prévoyez quand même un créneau d’1 heure 30 pour visionner cette vidéo, et un environnement calme car si on perd le fil de sa réflexion, c’est un peu comme avoir perdu le cordon de serrage de votre pantalon de jogging préféré… c’est une galère pour le récupérer 😀
Morceaux choisis
« Le métier de manager est particulièrement difficile parce que votre travail de manager sera exactement de faire travailler les autres. Et bien je vais vous dire…les autres…travailler…ils préfèreraient pas. »
« Les salariés, ce qu’ils recherchent, ce n’est pas le travail, c’est le bonheur. Les entreprises, ce qu’elles cherchent, ce n’est pas le travail, c’est le profit. Autrement dit, personne ne cherche le travail pour le travail. »
« Comment donner un sens un travail, étant entendu que personne ne cherche le travail pour le travail ? »
« Le mot valeur a deux sens; il y a la valeur économique et il y a la valeur morale. »
« Ma position tient en deux points :
- Le travail n’est pas une valeur morale…
- … c’est pourquoi il doit avoir un sens. »
« Le travail n’est pas une valeur morale; c’est ce que prouvent les vacances et le salaire. Le propre d’une valeur morale est d’être sans repos ni cesse, elle ne se paye pas, elle n’a pas de prix (la générosité, l’amour, la justice, etc…). Tout travail mérite repos et salaire donc il n’est pas une valeur morale. »
« La différence entre la valeur et le sens, c’est que la valeur est toujours intrinsèque, elle vaut pour elle-même. Le sens est extrinsèque, il renvoie toujours à autre chose qu’à lui-même. »
« Le mot sens a plusieurs significations : la sensation, la signification, la direction. »
« Le sens n’est jamais où l’on est, c’est toujours où l’on va. Personne ne peut aller où il est, ni être où il va. Le sens est toujours ailleurs. »
« Le sens du travail est autre chose que le travail. »
« Ce n’est pas le sens qui est aimable, c’est l’amour qui fait sens. »
« Les salariés ne travaillent pas par devoir ou pour des raisons morales, par amour du travail, de leur entreprise, de leur patron du client ou de l’actionnaire; ils travaillent par amour d’eux-mêmes et de leurs enfants. Ils travaillent pour être heureux. »
Aristote : « Le désir est l’unique force motrice »
Spinoza : « Le désir est l’essence même de l’Homme »
« Nous sommes des êtres de désir. Un dirigeant est avant tout un professionnel du désir de l’Autre. Si c’est du désir du client, cela s’appelle le marketing, si c’est du désir du salarié, cela s’appelle le management. »
« La seule façon d’avoir et de garder les meilleurs clients, c’est d’abord d’avoir et de garder les meilleurs salariés. L’intérêt majeure d’une entreprise est donc d’avoir et de garder les meilleurs salariés. La meilleure façon d’y parvenir est donc de créer des conditions telles que les collaborateurs soient plus heureux de travailler dans cette entreprise plutôt qu’une autre. »
« Le management sera réussi quand le manager aura créer des conditions telles que ses collaborateur (qui ne travaillent pas par amour du travail) réussissent à aimer le travail qu’ils font. De même, le management sera réussi quand le manager aura créer des conditions telles que ses collaborateurs (qui ne travaillent pas par plaisir du travail) prendront plaisir au travail qu’ils font. »
« Cela dépend bien sûr des conditions de travail, de l’ambiance dans la travail, des possibilités d’évolution dans ce travail, de l’utilité sociale, de travailler en harmonie avec ses valeurs personnelles, de la reconnaissance, etc… »
« Quand vous serez managers, n’oubliez pas d’être heureux vous-mêmes. »
« Il y a trois choses qu’un manager doit apprendre à dire à ses collaborateurs et subordonnés :
- Bonjour (c’est traiter l’Autre comme un être humain)
- Merci (la gratitude est une vertu morale)
- Comment ça va ? (c’est être attentif aux désirs de ses collaborateurs)
Dans les trois cas, c’est traité l’Autre comme un être humain. »
« Il faut aussi savoir dire non, car le manager tient aussi un rôle de pouvoir. Il y a cependant deux erreurs à éviter quand on est manager : la première est de croire que le pouvoir suffit (les petits chefs) et la deuxième de croire que l’humanisme suffit. »
Les questions que je me pose : il a managé combien d’équipes, de combien de personnes, et pendant combien de temps ce garçon ?
Cette remarque n’est pas très juste :
Il toujours enrichissant d’accepter d’entendre le point de vue de quelqu’un qui est complètement extérieur à votre activité, et qui vous apportera des outils pour une analyse différente.
Après, libre à vous d’y faire un tri. Mais ne le rejetez pas d’emblée…
🙂
Bonjour Bailly
Effectivement ce sont des questions pertinentes que nous pourrions nous poser.
En même temps, je ne suis pas sûr que l’hypothétique absence d’expériences managériales de Comte-Sponville lui enlève le crédit de sa réflexion sur le sujet.
Je me pose une question à mon tour : Comment se fait-il qu’une école de management réputée ait fait appel à lui pour introduire le cursus de ses étudiants ?
Ce qui m’a gêné, c’est « les bons et les mauvais « . Peu d’explications à leurs égards, et trop subjectifs. C’est comme à l’école chacun à son bon et ils se suffit de l’exploiter il me semble
Bonjour Kraska,
Votre remarque est très pertinente.
Comme dans tout exposé, il y a des éléments qui prêtent à polémique. LA Vérité n’existe pas, chez Comte-Sponville comme ailleurs.
L’idée générale, quant à elle, m’a semblé en revanche cohérente. C’est elle que j’ai aimée et que j’ai souhaitée partager.
A bientôt
Merci d’avoir amené la parole de André Comte-Sponville pour lequel j’ai un profond respect.