Partager la publication "Le Feedback 2.0 ou la critique constructive de dernière génération"
Que ce soit au travail avec ses collaborateurs, à la maison avec son conjoint ou ses enfants, ou encore avec ses ami(e)s, il arrive invariablement un moment où nous souhaitons dire à tout ce petit monde que nous ne sommes pas en accord avec leurs agissements, leurs comportements ou leurs propos.
De là, 2 options sont jouables:
1- Leur rentrer dans le lard et déballer ce que nous avons sur le cœur tel un volcan entrant en éruption. La colère est chaude comme la braise et la bave, pardon la lave, qui coule est chargée de propos toxiques et nauséabonds. Le risque avec cette option est de se brûler les lèvres avec des propos qui peuvent dépasser nos pensées et très probablement déclencher chez l’autre une réaction aussi intense voire agressive en guise de retour de flamme.
2- Opter pour une critique plus subtile, mais non moins efficace. Celle-ci aura même un impact plus important de part l’attitude posée caractéristique d’une bonne maîtrise de soi. Je sors volontairement du traditionnel « feedback sandwich » de plus en plus connu et dont l’efficacité commence, de fait, à s’étioler *. Ce n’est pas non plus la méthode de la Communication Non Violente qui demanderait beaucoup plus qu’un simple billet pour en parler. Je suis fan de la C.N.V et ne souhaite pas la réduire à une simple technique de communication. (Tiens, peut-être le sujet pour un prochain dossier?)
Préambule
Avant tout, il m’est apparu nécessaire de rappeler l’importance du contexte dans ce type de situation crispante. En effet, la première des actions à réaliser est d’évaluer les enjeux de la critique dans la situation.
En gros est-ce que le jeu en vaut la chandelle?
Même si la formulation de votre critique est faite convenablement (avec assertivité, voici un nouveau mot que j’ai appris il y a quelques mois 🙂 ), vous n’êtes pas à l’abri d’une compréhension limitée de votre interlocuteur qui percevra votre critique comme dirigée sur ce qu’il est et non sur ce qu’il fait ou dit. Il peut alors se sentir attaqué dans son être et montrer les crocs.
Quelques questions possibles à se poser pour évaluer les enjeux:
- Est-ce que ce que j’entends ou vois bouscule mes valeurs fondamentales? (encore faut-il les connaître, OK)
- Qu’est ce que j’aurais à gagner si je lui dis? (en terme relationnel et pas matériel)
- Qu’est ce j’aurais à perdre? (idem)
- Qu’est ce que lui (ou elle) aurait à gagner si je lui dis? (à votre bon cœur M’sieur Dames!)
- Qu’est ce qu’il (ou elle) aurait à perdre? (préserver l’autre dans son intégrité morale et son amour-propre est incontournable dans les relations humaines)
- Suis-je prêt(e) à m’engager dans un potentiel conflit? (facteurs d’influence multiples à l’instant T: humeur, forme, confiance, énergie psychique)
- Y-a-t-il des mots comme « Fierté », « Orgueil », « Ego » qui viennent polluer mon analyse de la situation? (ils sont sournois car on ne les entends pas beaucoup, mais ils sont très souvent là)
Bref, un rapide tour d’horizon des enjeux de la critique peut dans bon nombre de situations vous dispenser de sérieuses prises de tête. Le temps pris pour cette analyse vous permettra, de fait, de prendre le recul nécessaire pour éviter de réagir « à chaud ».
Maintenant, si le résultat conforte votre idée première de dire ce qu’il y a à dire, voici les 3 étapes de cette formulation 2.0.
Étape 1: Faire une proposition d’amélioration
Cette étape permet de faire un Paris-Nice sans passer par Tokyo, on va directement à l’essentiel. Bien entendu la suggestion se fera de manière assertive. L’idée est d’employer le « Je » en premier afin de s’impliquer dans la demande et de tourner celle-ci vers une action concrète à réaliser (le Faire) et pas sur une remise en question identitaire de la personne (l’Être).
Le but est de demander directement à notre interlocuteur ce que nous désirons voir s’améliorer à la place de ce que nous ne souhaitons plus constater.
Étape 2: Expliquer le pourquoi²
Il est souvent plus motivant de réaliser quelque chose quand nous comprenons pourquoi nous le faisons. C’est un peu l’histoire du sens que nous donnons aux actions que nous menons. Mais ceci est une autre histoire…
Ici, les explications se font suivant 2 formes (d’où le pourquoi² dans le titre 😉 ):
- La première sert à expliquer ce que notre proposition va permettre de faire ou d’obtenir (pour la personne, son environnement, ses relations, son comportement, etc…).
- La seconde sert à montrer ce que la personne éviterait ou ferait disparaître comme problème si elle tenait compte de notre proposition.
Étape 3: Finir par un message positif sur la personne
Ouf! Le brossage de poil n’a pas complètement disparu. Nous sommes sains et saufs.
Blague à part, je pense que la marque de gratification finale est loin d’être superflue. La reconnaissance est un sujet fondamental dans la construction de rapports humains équilibrés et déterminant pour la qualité relationnelle qui y est étroitement liée. Si ce commentaire positif sur la personne est fait avec sincérité, elle le prendra comme ce qu’elle est, une réelle marque de reconnaissance, et pas comme une tartine de crème passée en couche épaisse.
Quelques exemples contextualisés
- Avec un enfant ayant fait des fautes d’orthographe dans son devoir
» J’aimerais que tu revoies l’orthographe de ton devoir en t’aidant du dictionnaire, comme ça tu pourras rendre une copie sympa à lire et cela t’évitera d’avoir un résultat insatisfaisant. Tu as déjà un style d’écriture très fluide et ta grammaire est correcte. »
- Avec un collaborateur qui oublie de transmettre des informations importantes
« Je te suggère de noter au fur et à mesure sur un carnet les informations que tu dois me transmettre, ainsi nous pourrons traiter les demandes plus rapidement et le service client ne sera plus débordé. Tu gères généralement bien ton temps et ceci pourrait nous en faire gagner d’avantage ».
- Avec un(e) ami(e) qui est en réaction impulsive face à des situations contrariantes.
« Je pensais que quand tu te trouves dans cette situation, tu pourrais prendre un ou deux jours de réflexion afin d’avoir un peu de recul sur les évènements et être le plus objectif possible dans ta réponse; cela t’éviterait aussi de réagir à chaud et d’aggraver le problème. Tu as de valeurs respectables et tu sais comment bien les défendre quand tu te montres plus calme. »
A vous de jouer…
A la semaine prochaine
Cet article me pousse à 2 propositions :
– souligner encore l’impact d’une communication positive (non violente ?) qui formule ou reformule toujours une idée en faisant abstraction de toute négation : cette forme de communication « réconcilie » notre cerveau avec notre être et nous conduit à la mise en place d’actions …
– transformer notre questionnement à la recherche du « pourquoi » qui souvent oriente vers une justification ou une recherche de cause, par un questionnement du « POUR QUOI » qui conduit la réflexion effectivement vers le recherche de sens, de motivation dans ce que nous faisons !
Eric de Pommereau – Coach
Merci Eric de ton commentaire. Oui, nous ne le dirons jamais assez, le sens que nous donnons à nos actes quotidiens stimulent nos sens et est cens(é) nous rendre plus sens(é) et sens(ible) à notre environnement 😉
L’article me rappelle un livre que j’ai lu il y a quelques mois, c’était l’autobiographie d’un négociateur du RAID. Et les étapes dont vous parlez me rappelle exactement les étapes d’une préparation à la négociation.
Qu’est-ce que j’y gagne ? Qu’est-ce que l’autre gagne ? Que puis je proposer pour un accord gagnant-gagnant ?
Bonjour Pascal
Il n’y a pas de secret, ce qui fonctionne dans un contexte peut, grâce à quelques adaptations, fonctionner dans un autre. Et dans les cas extrêmes des négociateurs du RAID, il y a plutôt intérêt à ce que les techniques fassent leurs preuves 🙂
Merci pour ton commentaire.
Autre référence qui rejoint les propos :
Les règles d’or des ressources humaines de Dale Carnegie :
» Mentionnez vos erreurs, avant de corriger celles des autres. »
» Posez des questions plutôt que de donner des ordres. » …
Bonjour Vincent
Merci pour votre commentaire
Voici 2 principes très intéressants. Le dernier que vous mentionnez me rappelle ma dernière séance. Nous avons justement abordé et développé ce point avec ma cliente. Et associer le questionnement avec le silence est aussi très intéressant.
Cette réflexion vient à point ,je suis en effet confrontée à un problème de comportement d’une de mes collègues dans son attitude de non prise de conscience de certains de ces actes et paroles dans le milieu professionnel (médical).
Je vais utiliser ces conseils.
Merci Michèle
Merci pour votre commentaire Michèle.
N’hésitez pas à nous faire un petit retour sur votre expérience avec votre collègue. C’est toujours intéressant de passer de la théorie à la pratique.
A bientôt.