S’il y a bien un truc avec lequel j’ai un peu de mal, c’est le défaut d’engagement. Par défaut d’engagement, j’entends le non-respect d’un contrat passé entre deux systèmes distincts (individus, équipes, organisations). Une expérience récente m’a donné l’idée de ce billet (quand je vous disais que la vie quotidienne est remplie de situations où les rapports humains et les relations humaines sont à l’honneur…). Cette semaine, je vous propose donc un voyage au pays du contrat ou plutôt DES contrats, car nous allons voir qu’il n’y a pas qu’un seul type de contrat.
Pour la petite histoire, que je vous fais courte, je devais organiser un événement local dans le cadre de rencontres mensuelles au sein de la fédération de coach (ICF) dont je suis membre. L’événement en question devait voir une intervenante présenter son domaine d’activité et partager son expertise en animant une sorte de conférence/atelier de deux heures.
J’en ai donc contacté une première qui m’avait donné son accord pour intervenir dans ce type d’événement. Quelques jours après, elle se désistait. J’ai donc mobilisé mon réseau pour en approcher une deuxième, que je contacte. Elle aussi me donne son accord et… se désiste après une semaine.
Bon, OK, vous allez me dire que je sors de l’oeuf, que ces comportements relèvent d’un quotidien tout ce qu’il y a de plus banal et que le premier exemple de non-respect des engagements se fait de façon flagrante au plus haut niveau de l’état. Vous avez probablement raison, et en même temps ce n’est pas parce que nous savons que la pluie mouille ou que le soleil brûle que nous ne nous en protégeons pas. Et puis ça me fait du biscuit à partager avec vous dans ces quelques lignes qui, je l’espère, sauront vous intéresser.
C’est quoi un contrat ?
D’après ma bible en matière de définitions, synonymes et autres conjugaisons (j’ai nommé Antidote), un contrat est une “Convention par laquelle une ou plusieurs personnes s’engagent envers une ou plusieurs autres à donner, à faire ou à ne pas faire quelque chose”.
D’après Eric Berne, fondateur de l’Analyse Transactionnelle, un contrat est un “Engagement bilatéral en vue d’une action bien définie”.
Enfin, l’encyclopédie Wikipédia définit un contrat comme une “convention formelle ou informelle, passée entre deux parties ou davantage, ayant pour objet l’établissement d’obligations à la charge ou au bénéfice de chacune de ses parties”.
Nous voyons clairement avec ces quelques exemples que les notions d’engagements, d’action et de réciprocité sont mises à l’honneur. Et en poussant un peu mémé dans les orties, je dirai même que ces notions sont proches des valeurs du même nom, Engagement, Action, Réciprocité (du moins vu de ma fenêtre).
Ceci explique, peut-être en partie, le côté “j’ai un peu de mal avec le défaut d’engagement”. Ces valeurs étant importantes pour moi, le fait de les titiller peut mettre à mal mon côté zen.
Un contrat ? Non, des contrats
Si nous reprenons l’exemple du début, le contexte de ce type d’intervention ne nécessite pas forcément de contrat écrit avec moult paragraphes et autres alinéas, signés par les parties en présence, en double exemplaires et avec la mention “lu et approuvé”. Mémé a déjà été poussée dans les orties une fois ; je ne vais pas abuser…
C’est là que nous voyons qu’il existe différents types de contrats.
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Le contrat moral
Ce type de contrat est celui qui ressemble le plus à l’exemple de ce billet. Le socle sur lequel il repose est principalement composé d’un élément incontournable dans les rapports humains: la confiance. D’autres éléments non moins indispensables gravitent autour du contrat moral tels que la loyauté, l’honnêteté ou l’intégrité. Tous ces éléments sonnent un peu comme des valeurs, ne trouvez-vous pas?
Compte tenu de cette proximité avec le monde des valeurs, Il n’est pas rare de considérer le contrat moral comme ayant plus de “valeur” aux yeux des parties prenantes (…ou du moins pour l’une d’entre elle 😉 ) qu’un contrat de type conventionnel que nous verrons plus bas.
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Le contrat relationnel *
Celui-ci a été mis en lumière par un certain Ian Macneil professeur de droit aux Etats-Unis dans les années 70-80. D’après lui, dans ce type de contrat, la relation qui unit les parties est essentielle. Ce type de contrat inclut l’élément de durée et celui d’engagement personnel. Macneil part du principe que le développement de relations entre des contractants nécessite un engagement personnel de leur part. Ainsi, plus la durée du contrat sera longue, plus les relations entre les parties pourront se développer.
Selon cette théorie, les individus qui participent à un échange relationnel ne retirent pas seulement de simples satisfactions économiques. La relation leur apporte aussi une satisfaction personnelle, de nature plus affective.
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Le contrat conventionnel
Le plus connu de tous. Il est composé de toute une ribambelle d’articles à respecter par les parties contractantes. Généralement lu (pas toujours comme il le faudrait 🙂 ) écrit, daté et signé, nous le retrouvons partout dans notre vie et dans toutes sortes de contextes (travail, mariage, téléphonie, habitation, assurance, internet, banque, etc.)
L’intérêt principal de ce type de contrat est qu’ il sert de support juridique en cas de litige sur l’un ou l’autre des articles énoncés dans le contrat. D’où la nécessaire vigilance, que peu d’entre nous avons, dans la lecture de ces contrats. Qui a déjà lu complètement (voire partiellement) le contrat de son fournisseur d’accès internet ou celui d’iTunes?
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Le contrat tripartite
A la croisée des différents types de contrats que nous avons vu jusque là, le contrat tripartite ou contrat triangulaire fait intervenir (au minimum) une tierce partie dans le système. En coaching, nous l’utilisons essentiellement en entreprise où le bénéficiaire du coaching n’est pas forcément le prescripteur (ni le payeur). Par exemple, il peut s’agir d’un directeur des ressources humaines qui fait appel à un coach pour accompagner un salarié dans l’un des services de l’entreprise.
Nous pouvons aussi retrouver cette configuration en dehors de la sphère professionnelle et ce, dès qu’ une personne demande à un coach (ou autre) d’intervenir auprès d’une tierce personne (parents, couple, famille, club sportif, etc.)
Je ne vais pas plus avant dans la description de ce type de contrat qui demanderait un billet à lui tout seul. C’est donc ce que je vous propose avec ce document rédigé par l’une des figures de proue du coaching dans notre contrée, Alain Cardon. Cliquez sur l’image ci-dessous pour télécharger le document.
Si vous avez des commentaires à ajouter pour enrichir cette notion de contrat, je vous invite à le faire juste au-dessous.
A la semaine prochaine.
* Najoua ELOMMAL et Jean PERRIEN “Proposition d’un modèle de l’influence des normes de la relation de Macneil (1980) sur la satisfaction d’un client vis à vis de son institution financière principale”
D’abord, merci pour ce texte sur un aspect de la vie professionnelle qu’on n’aborde pas souvent pour ne pas dire pas du tout :: son côté contractuel.
Oui. Quelqu’un vous propose de réaliser quelque chose et il vous dit qu’il vous a choisi en raison de vos compétences et de votre expertise. C’est flatteur. Alors, vous acceptez. Et, par la suite, vous vous rendez compte que vous vous êtes emparquéE dans une aventure que vous ne pouvez pas ou ne voulez pas livrer. Et vous vous désistez.
Ce que je retiens c’est que en tant que contractant mandataire, il serait sans doute prudent d’ajouter une étape quelque part entre le recrutement de la ressource et la réalisation du contrat.
La question est la suivante :: Comment faire pour «assurer» (dans le sens de prendre une police d’assurance) l’engagement de la ressource dans le projet ? … surtout si le mandat n’est pas accompagné d’honoraires faramineux.
Je pense qu’on peut faire deux choses :: Repérer d’avance l’avantage que la réalisation du mandat représente pour la personne et le lui dire et le lui garantir lorsque cela est possible (par exemple, la visibilité). Ensuite, si on essayait de pelleter la responsabilité de l’engagement dans la cour du professionnel repéré ? Par exemple, décrire le contexte et la nature de la prestation qu’on propose. Et ensuite, laisser du temps à la personne pour évaluer :; 1) ses capacités à réaliser (les compétences) et 2) son intérêt véritable (sa motivation).
Autrement dit, annoncer ses couleurs dès le départ, du style :: Nous avons besoin de pouvoir nous fier sur la personne qui acceptera ce mandat. Pensez-y quelques jours et je vous recontacterai pour finaliser l’entente avec vous.
Christophe, est-ce que tu penses que cela pourrait permettre de mieux se garantir contre le défaut d’engagement ou, à tout le moins, d’en réduire le risque ?
Suzanne
Oui Suzanne, tes propositions sont pertinentes. Elles peuvent, en outre, très bien s’adapter à ce contexte d’évènements à enjeux mineurs mais néanmoins mobilisateurs d’énergie et de temps.
Merci pour ton éclairage toujours enrichissant.
Bonjour Christophe,
Il est de toutes les façons je crois, et cela les aspects juridiques ou législatifs ne pourront rien y changer,une tendance lourde chez beaucoup de nos contemporains : la manque d’engagement et la légèreté de la parole donnée.
C’est le côté « cavalier » de la chose qui est, à mon sens, à relier à l’attitude du « je prends, je laisse ». Curiosité, éparpillement, légèreté, notre société récolte aussi sous diverses formes ce qu’elle a semé… les effets sont nombreux et observables.
Merci de ton témoignage.
Amicalement,
Norbert
Oui Norbert, l’environnement dans lequel notre société évolue ne facilite pas la démarche d’engagement. Je suis bien d’accord avec ça.
Merci de ton apport.
A bientôt